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Le Blog de Henri REDIER
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Le Blog de Henri REDIER
23 février 2013

Non Cumul des Mandats

Du non-cumul des mandats au grand cumul des hypocrisies

 

Depuis quelques jours la question récurrente du non cumul des mandats agite le microcosme politique.

Les prises de positions de certains élus, l'avis du Conseil d'Etat prônant une application de cette mesure seulement en 2017 ont relancé la polémique.

Ce thème populaire chez les militants politiques de base et les électeurs français a été instrumentalisé en particulier par Martine Aubry et son équipe pour se créer une légitimité après son élection contestée et contestable comme première secrétaire du parti socialiste après le calamiteux Congrès de Reims. Le but étant aussi de se créer un espace de manœuvre au sein du parti en déstabilisant les éléphants d'alors.

Le point d'orgue de cette opération fut l'Université d'été de la Rochelle de 2009 où les militants présents ont plébiscité la mesure et Martine Aubry par une "standing ovation" interminable, en présence d'une brochette de hiérarques socialistes cumulards et atterrés.

Le non cumul des mandats est depuis un dogme de la pensée socialiste et le plus sûr moyen d'emporter l'enthousiasme d'une salle même avec un discours médiocre.

Ne vous méprenez pas sur mon propos ; je suis pour le non-cumul des mandats et tout particulièrement de celui des parlementaires, même si je ne suis pas un ayatollah de la mesure.

Ce qui m'interpelle aujourd'hui c'est la grande hypocrisie du plus grand nombre sur la volonté de la mettre réellement en œuvre.

De cette crainte, d'une crainte plus générale de ne pas voir se mettre en place la rénovation de mon parti le PS, en constatant la nouvelle glaciation voulue par les apparatchiks éternels, j'ai participé à la création d'un motion appelée "question de principes" qui visait à ne pas faire oublier les promesse de rénovation du PS mais bien au delà de la vie politique française.

Nous nous voulions les aiguillons de la rénovation.

Au vu de la situation actuelle nos craintes n'étaient pas vaines.

Les parlementaires qui avaient signé un courrier avant les législatives promettant de quitter leurs autres fonctions exécutives en cas de victoire, n'ont pas tenu leur engagement et font blocage au Sénat et à l'assemblée nationale.

D'autres plus subtils, conscients de la popularité du non cumul, taclent leurs amis, se posent en parangon de vertu et la main sur le cœur nous proposent un référendum qu'ils savent improbable dans le contexte actuel et ce faisant d'une pierre deux coups.

Ce sont les même qui bien souvent cumulent en toute tranquillité, et n'ont pas hésité à se présenter aux dernières législatives.

Dans l'Ain par exemple tous les candidats aux législatives à gauche comme à droite étaient au minimum maire d'une commune, président ou vice président d'un conseil général, d'une intercommunalité ou d'un conseil régional.

Grand cumul des hypocrisies donc, mais il serait faux de dire que seuls les cumulards sont fautifs, nous même les militants, mais aussi nous même les électeurs qui applaudissons bruyamment et longuement les chauffeurs d'estrades qui nous vendent leur non cumul sommes bien souvent des hypocrites.

Car dès que les lumières des meetings s'éteignent, dès que nous retournons chez nous, sur nos territoires, la réalité nous apparait. Chez nous pour gagner nous voulons le plus beau, le plus fort, le plus titré, qui défendra à Paris, les intérêts de notre commune, de notre canton, de notre région, et qui mieux que le maire de notre ville, le conseiller général de notre canton et le conseiller régional de notre territoire pourra le faire et....s'il fait tout cela en même temps c'est encore mieux.

J'affabule ?

J'aimerai bien. Prenons un exemple proche : la troisième circonscription de l'Ain, la seule à avoir organisé une primaire pour choisir son candidat député.

Trois candidats :

le vainqueur élu par les militants est maire, président de sa communauté de communes, conseiller général et par ailleurs président d'au moins une association parapublique départementale.

Le second est conseiller général

Le troisième est seulement conseiller municipal d'opposition.

 

Je suis prêt à parier que le résultat a été globalement le même dans toutes les primaires internes de France.

 

Grand cumul des hypocrisies donc.

 

Pour ma part cela m'amène à prendre beaucoup de distance par rapport au discours des uns et des autres.

 

Mais tout cela est anecdotique par rapport à ce qui m'inquiète beaucoup plus et qui est le cumul généralisé, je dirai presque la confiscation de tout ce ressemble à une miette de pouvoir.

Une aristocratie est née, qui regroupe la sphère médiatique, la politique, la haute administration et le monde des affaires et le syndicalisme, au niveau bien sûr des directions.

Une perméabilité complète entre ces différents domaines permet une concentration et un verrouillage du pouvoir dans notre société qui rend toute évolution pratiquement impossible.

Notre gouvernement en est à la fois le fruit et la victime.

Prenons un exemple Louis Gallois, ancien directeur de cabinet de Jean Pierre Chevènement en 1981, puis dirigeant de la SNCF , puis d'EADS, aujourd'hui il est commissaire général à l'investissement, producteur d'un rapport sur la compétitivité, président de la fédération nationale des associations de réinsertion sociales (FNARS) (l'ancienne présidente étant nommée au Conseil Constitutionnel) et Administrateur indépendant de PSA-Peugeot-Citroën.

Ce cursus d'actualité n'est pas atypique : il est même la norme en France.

La confusion est devenue la norme.

Les rôles sont interchangeables et cumulatifs, les conflits d'intérêts constants, la soumission à la pensée unique inévitable, l'exclusion de la diversité inscrite (encore plus la sociologique que l'ethnique ).

Ce non-cumul bien plus large que celui des mandats est une nécessité pour rendre son dynamisme, son inventivité, son envie de progrès à nos société européennes, où en paraphrasant le film "le guépard" il ne faut bouger que lorsque le but est de ne rien bouger.

Pour rénover, il faut cloisonner comme c'est le cas entre le législatif, l'exécutif et le judiciaire, la haute fonction publique, le politique et la sphère médiatique (Un haut fonctionnaire ne pouvant être un politique que s'il démissionne de son poste (plus encore de conseiller d'Etat, de conseiller à la Cour des Comptes, et de l'administration de Bercy etc).

En contrepartie l'élu devra avoir un statut lui permettant de remplir sa fonction efficacement de manière à garantir la diversité des origines sociologiques et...géographiques.

Une nomenclature des conflits d'intérêts entre mandats, fonctions, professions publiques ou privées, présidences de commissions, d'associations devra être établies de manière à rendre impossible certains cumuls.

 

Si nous nous engageons dans cette réforme là, nous changerons réellement notre vie politique, nous l'ouvrirons à tous nos concitoyens. Mais mon petit doigt me dit que la caste qui nous dirige a encore de beaux jours devant elle, et je le crains avec notre complicité passive.

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